Cameroun – collectivités territoriales décentralisées : Bras de Fer entre Le ministre délégué à la présidence de la République en charge des marchés publics , Ibrahim Talba Malla et le maire de la ville de Douala Dr. Roger Mbassa Ndine
Le ministre délégué à la présidence de la République en charge des marchés publics , Ibrahim Talba Malla vient d’adresser une correspondance au Maire de la ville de Douala , Dr Roger Mbassa Ndine , exigeant l’annulation pure et simple et sans délai de la suspension du président de la commission interne de passation des marchés publics auprès de la communauté urbaine de Douala .
En effet , ce dernier avait été suspendu le 11 avril 2022 suite à une décision du chef de l’exécutif de la mairie de la Douala . Cependant le Minmap ordonne que sieur Etoa Moussongo Henri ( le suspendu ) soit rétabli dans ses fonctions . Dans la correspondance du ministre Talba Malla signée le 3 juin 2022 , l’autorité en charge des marchés publics au Cameroun invite le Maire de la ville de Douala à se conformer dans les meilleurs délais à sa décision afin de rétablir le sieur Etoa Moussongo Henri dans ses fonctions . Pour le ministre délégué à la présidence chargé des marchés publics , il s’agit d’une violation de la réglementation par le Maire Mbassa Ndine et qui l’expose par ricochet aux sanctions prévues à l’article 194 du code des marchés publics .
Seulement , à la communauté urbaine de Douala , cette injonction du ministre Talba Malla a reçu une fin de non recevoir . Elle est battue en brèche par l’exécutif de la communauté urbaine de Douala , qui estime que le ministre des marchés publics n’est pas sa tutelle au regard de la loi portant code général des collectivités territoriales décentralisées ( CTD) et par conséquent n’a pas des ordres à recevoir . Selon la Mairie de la ville , le ministre Ibrahim Talba Malla aurait dû saisir le ministre de la décentralisation et du développement local , qui à son tour instruit le préfet de céans , qui est d’ailleurs le représentant du chef de l’État dans le Wouri. Certains grands conseillers municipaux qualifient de maladroite la démarche du ministre des marchés publics en soutenant mordicus que la loi confère au Maire de prendre une telle décision . Ils ont convoqué l’article 13 alinéa 3 du texte de loi portant code général des collectivités territoriales décentralisées . Cet alinéa stipule que le chef de l’exécutif peut prendre ou faire prendre tous actes conservatoires ou interruptifs de déchéances . En plus l’article 75 du même code relève que les décisions réglementaires et individuelles prises par le chef de l’exécutif de la collectivité territoriale dans le cadre de l’exercice de ses pouvoirs de police , les actes de gestion quotidienne , sont exécutoires en plein droit dès qu’il est procédé à leur publication ou notification aux intéressés . Sur un autre angle , l’exécutif communautaire s’est appuyé sur l’article qui met en lumière le rôle de l’appui – conseil. A la lecture de l’article 14 du code général des collectivités territoriales décentralisées , il est écrit noir – sur blanc que l’appui – conseil consiste à fournir des conseils , avis , suggestions et informations aux CTD ( collectivités Territoriales décentralisées ) dans l’exercice de leur compétence . A la CUD , l’on pense que cette sortie de l’autorité des marchés publics est de nature à plomber davantage le processus de la décentralisation tant souhaité par le chef de l’État .
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Bras de fer entre le Minmap et le Maire de la ville : regard de l’expert .
Interrogé sur le sujet , le spécialiste en question de gestion des marchés publics , Mouncherou Abdoul Aziz , doctorant en droit public et auteur de quelques ouvrages ( « le rôle de l’autorité des marchés dans la commande publique locale … » Le contrôle des marchés publics locaux au Cameroun « ) a une autre lecture quant au climat de tension qui règne désormais en ce moment entre le Maire et le ministre des marchés publics . Pour cet expert , la sortie du ministre Talba Malla est légale . Il motive sa thèse en précisant que le code des marchés publics prévoit en son article 11 que les présidents des commissions internes des marchés publics sont nommés par l’autorité des marchés publics . Ici , il s’agit du Minmap . » Et du fait du parallélisme des formes en droit , seule une autorité qui a nommé peut révoquer … » Relève le spécialiste . Il poursuit en disant qu’il appartient au ministre de révoquer le président de la commission interne des marchés publics auprès de la CUD s’il constate que ce dernier a violé les dispositions du code des marchés publics . » Cependant , il n’appartient pas au maire de le faire …lorsqu’on lit la correspondance du ministre , on se rend à l’évidence que ce monsieur ( ministre ) a été courtois en demandant au Maire dans le cadre du respect des parallélismes des formes de rapporter sa propre décision qui suspend le président de la commission interne des marchés publics …il aurait pu sanctionner directement le Maire en application de l’article 194 du même code qui lui donne le pouvoir de suspendre les maîtres d’ouvrage . Dans les mairies , les maires sont des maîtres d’ouvrage .Cet article lui donne le pouvoir de suspendre le maître s’il se rendrait coupable de la violation des dispositions du code des marchés publics … » rappelle Mouncherou Abdoul Aziz expert en question des marchés publics .
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Dans sa logique , il précise qu’il y’a une procédure pour suspendre un acteur dans le système des marchés publics . » Ça ne se passe pas comme le Maire a fait .Seul le ministre a le pouvoir de poser un tel acte … Il ne peut pas se substituer au ministre dans le cadre de son domaine et dire qu’il n’avait pas à lui donner les injonctions au nom de la décentralisation … Il faut lever le voile sur la décentralisation . Quand on parle de la décentralisation , ça veut dire le Maire exerce des compétences qui lui sont transférées par des départements ministériels … Donc chacun de ces départements ministériels peut exercer dans le cadre des compétences qu’il a transféré … Par conséquent peut exercer une tutelle sur les collectivités territoriales décentralisées … » Martèle le spécialiste . Pour être conforme et logique dans sa démarche , il fait savoir que s’il existe un litige entre le Maire et le président de la commission interne , il doit être porté à l’attention de la commission d’examen de recours , créée en 2018 . Il estime qu’il n’appartient pas au Maire de juger et de sanctionner .